Concertation, piège à contestation
Lors d’une réunion publique sur les projets de rénovation urbaine, notamment le lac de la Villeneuve, le 28 septembre 2023, pendant la concertation. (photo : BB, Le Crieur de la Villeneuve)

La concertation sur les nouveaux projets de rénovation urbaine, dont l’aménagement du lac de la Villeneuve, s’est tenue du 4 septembre au 15 octobre 2023. Les résultats, marqués par une forte opposition au projet du lac, ont été présentés au conseil métropolitain du 22 décembre dernier. Sans remise en question.

Un mois et demi de concertation dans un quartier de 10 000 habitants donne… 521 contributions. Pas énorme mais dans l’ordre de grandeur du nombre de voix de la liste Grenoble en commun, du maire Éric Piolle, en 2020, avec 730 suffrages à la Villeneuve. Rappel nécessaire car la municipalité actuelle évoque fréquemment sa légitimité issue des élections municipales.

Cette concertation auprès des Villeneuvoises et des Villeneuvois de Grenoble (mais aussi du côté de la Villeneuve d’Échirolles), du 4 septembre au 15 octobre, portait sur les dossiers inclus dans la clause de revoyure (lire l’article Les 10 et 90 galerie de l’Arlequin rénovés, les 110 et 120 non) du projet de rénovation urbaine du quartier. Parmi les chantiers prévus : la démolition de l’ancienne école des Charmes (qui abritait jusqu’à peu la Régie de quartier et qui a été rénovée dans le cadre de l’Anru 1, il y a un peu plus de dix ans), la réhabilitation des 10, 60 sud et 90 galerie de l’Arlequin, la transformation de l’ancienne piscine Iris, la réhabilitation du Patio et, sujet sensible, la transformation du lac de la Villeneuve pour le rendre baignable (lire à ce sujet l’article Le lac baignable, une fausse bonne idée ?).

Certains projets ne rencontrent pas d’opposition, comme la réhabilitation des 60 sud et 90 galerie de l’Arlequin ou la réhabilitation du gymnase de la Rampe. La transformation de l’ancienne piscine Iris est approuvée, même si 11 des 42 contributions regrettent qu’elle ne soit pas rénovée en piscine.

Concernant la réhabilitation du 10 galerie de l’Arlequin (25 contributions lors de la concertation), si le rapport note que « l’enjeu de mixité sociale et d’amélioration du « vivre ensemble » est apprécié », il souligne aussi qu’« une partie importante des contributions exprime leur opposition à la démolition en cours [elle est maintenant terminée, ndlr] du 20 galerie de l’Arlequin ».

Quant à la démolition de l’ancienne école des Charmes, située au pied du 10-20 Arlequin, difficile d’avoir l’avis des habitants car seules quatre contributions ont été recensées. Trois personnes s’y opposent et une est neutre, indique le rapport.

Dans l’ensemble, le rapport note « un attachement patrimonial fort » au quartier.

Lac, je boirai de ton eau

Le principal sujet, de loin, reste la transformation du lac, avec près de 420 contributions. Une forte opposition au projet est exprimée : 57 % d’opinions négatives, 29 % neutres et 14 % positives. « Si la plupart [des contributions] s’accordent à considérer que les enjeux visés sont louables, […] c’est le contenu du projet et sa mise en œuvre qui leur pose problème. », détaille le rapport. Les auteurs rappellent d’ailleurs que le projet du lac a fait l’objet d’une pétition, dans le cadre dispositif d’interpellation citoyenne, avec plus de 1000 signataires.

Parmi les griefs, la mise en place de barrières autour du lac ; la fermeture du chemin du Parc qui longe le lac ou encore un coût d’investissement trop important (4,2 millions d’euros HT selon la Ville) par rapport au bénéfice d’une baignade autorisée. Les commentaires positifs pointent, eux, « les économies d’eau […], limiter l’accès aux chiens […], la création d’un espace de détente ».

Quel sens donner à cette opposition au projet ? Le rapport opte pour l’argument classique en démocratie représentative : si les habitants s’opposent au projet ce n’est pas parce qu’ils l’estiment mauvais, c’est parce que, d’après le rapport, ils n’y ont rien compris ! « D’une manière générale, on note de nombreuses contributions qui traduisent une méconnaissance du projet de rénovation urbaine. », tente d’expliquer le rapport.

La conclusion est du même acabit. Si « la Ville de Grenoble […] a bien entendu l’ensemble des demandes et craintes des contributeurs », il n’y aura ni remise en question du projet, ni modification substantielle. Le maître-mot de cette conclusion est « communiquer ». Six occurrences en une page ! « Il faut d’ores et déjà largement communiquer sur les modalités de fonctionnement et de gestion du futur lac. » ; « Il sera nécessaire pour la Ville de Grenoble de communiquer largement sur les conditions techniques de maintenance » ; « de communiquer largement sur le règlement intérieur » ; « il est important de communiquer sur l’ensemble des futurs aménagements » ; « de continuer à affiner et communiquer sur les coûts d’investissements » ; « de préciser et communiquer sur l’évaluation des futurs coûts de gestion et faire preuve de pédagogie ». Vous allez bien finir par adhérer à ce projet, non ?

Lors d’une réunion publique sur la rénovation urbaine, le 28 septembre au Patio, pendant la concertation, Gilles Namur, adjoint aux Espaces publics, à la Nature en ville, à la Biodiversité et à la Fraîcheur [sic], aux Mobilités mais aussi à la Circulation, au Stationnement, à la Réglementation de la publicité et enfin aux Pré-contentieux [resic], avait lancé, à propos du lac, « Nous ne sommes pas du tout dans un projet de co-construction. » Ce qui a le mérite d’être clair.