Place à la caravane-sauna
La caravane-sauna, sur la place des Géants, fait la promotion d’un lieu de soin à la Villeneuve. (photo : BB, Le Crieur de la Villeneuve)

Que faire de l’ancienne piscine Iris, fermée en 2015 ? Un collectif d’associations propose d’y créer un espace de bien-être. Pour promouvoir son projet et recueillir des idées, il amène une caravane-sauna à Villeneuve.

À la sortie de la caravane, les deux femmes ont les joues rouges. « On est très détendues. », confie l’une d’elle. Les deux sœurs viennent de passer vingt minutes dans la caravane-sauna installée sur la place des Géants. Du toit de la caravane, un petit panache de fumée s’élève, le poêle fonctionne à plein régime. À l’intérieur, la température approche les 90 °C. Dans la maison des habitants toute proche, les gens se font masser ou sirotent un thé.

Samedi 16 février, l’Oasîch — pour Oasis îlot de chaleur humaine — venait pour la troisième fois dans le quartier. « Les deux premières fois on a eu beaucoup de monde, presque trop lors de la deuxième séance, en janvier. », explique Morgane Cohen, du collectif Iris, un des groupes d’habitants organisateurs de l’événement.

Collectif Iris

« Le public est chaque fois différent, même si certains reviennent, continue-t-elle, le massage renvoie à quelque chose d’intime. La dernière fois, un homme s’est fait massé alors qu’il n’avait jamais reçu de massage de sa vie. C’était quelque chose de fort pour lui, ça lui a fait ressentir plein d’émotions. » Pour le collectif, ces samedis après-midis dédiés au bien-être sont « un succès, les gens très contents ».

Réunissant plusieurs associations du quartier (Kiap, Villeneuve Debout, Planning, Afric’Impact-BatukaVI, Agecsa) depuis fin 2017, le collectif Iris souhaite promouvoir la création d’un lieu de soin dans le quartier, qui regrouperait, parmi les pistes de réflexion qui ont émergé, un salon de massage et un sauna. Le tout installé dans l’ancienne piscine Iris. Pas simple selon l’organisatrice : « Inventer de nouvelles choses dans le quartier, ce n’est pas évident. Il faut convaincre mais le discours ne marche pas toujours. » Le collectif a donc décidé de montrer par l’exemple qu’un lieu de soin pouvait fonctionner à Villeneuve. « On montre que ça se passe bien, que c’est accueillant, que ça attire les gens du quartier et d’ailleurs. » Le collectif profite ainsi des séances de soin pour récolter les avis et peaufiner son projet.

Sauna populaire

Les personnes interrogées samedi sont toutes enthousiastes à l’idée de créer un lieu de soin dans le quartier : « Il faut le faire absolument, il y a une forte demande. » dit l’une d’elles. « C’est une très bonne idée, mais la question du financement va se poser. », nuance une autre. Un sauna est bien une envie des habitants, mais est-ce un besoin ? « Les femmes du quartier avec qui je discute disent que des saunas, comme vrais lieux populaires, c’est-à-dire pas chers et proches des pratiques des bains publics plutôt que des instituts de soin, il n’y en a pas beaucoup à Grenoble. La tradition est d’y aller une fois par semaine, là elles y vont plutôt une fois par an. » Quant au massage, « plein de gens n’y ont jamais accès. En France, ça reste connoté comme érotique ou sportif. Il y a besoin de lieux pour apprendre le soin du corps, retrouver le rapport avec son corps. »

Sauna mobile
La caravane-sauna a été construite par Arthur Antilla, un franco-finlandais installé dans le Trièves. « J’ai toujours eu un sauna chez moi », raconte-t-il.« J’en ai construit une dizaine, même si ce n’est pas mon métier. » Il fait tourner sa caravane-sauna dans la région, de festivals en événements sportifs. « En Scandinavie, un sauna c’est comme une salle de bains, ce n’est pas du tout bourgeois comme ça peut être perçu en France. »

La piscine Iris a été fermée par la mairie, pour raisons budgétaires, en 2015 (lire l’article Fermeture de la piscine Iris, la mairie reste sur sa ligne). En 2017, le bâtiment avait été intégré dans le programme « Gren’ de projet », destiné à trouver des investisseurs privés ou publics pour occuper des bâtiments municipaux désaffectés. Deux projets associatifs — dont celui du collectif Iris — avaient été déposés pour l’ancienne piscine, mais aucun retenu. « La Métro a proposé qu’on fusionne les projets, ils nous ont reproché de ne pas être techniquement assez costauds. », raconte Morgane Cohen. Mairie et Métro ont donc initié un autre cadre de travail, sous forme de réunions régulières entre les techniciens des deux collectivités et le collectif.

Les après-midis bien-être ont « convaincu plein de gens, dont certains techniciens qui nous accompagnent », détaille la membre du collectif
Iris, « un d’eux était étonné, il a vu la caravane-sauna, il était super intéressé ! »

Selon le collectif, « les élus seraient en passe de se laisser convaincre par l’idée ». La mairie proposerait un autre cadre d’aménagement du bâtiment, par modules, qui regrouperait plusieurs lieux de vie. Une solution à laquelle adhère le collectif. Reste désormais à résoudre la question du financement des travaux. Jointe par Le Crieur, la mairie n’a pas donné suite à nos demandes d’interview.

Ajout du 10 avril 2019 : un commentaire posté sous l’article précise que « Les Oasîch ont été pensées dans le cadre du projet Artcare, porté par l’association Archaologie et le Musée du Temps libre situé dans le quartier Renaudie-Chamberton, à Saint-Martin-d’Hères (http://museedutempslibre.org/). Archaologie a pu soutenir le projet du collectif Iris en proposant un dispositif et les moyens de faire vivre un espace temporaire de soins du corps à la Villeneuve durant l’hiver. »