« Mon père vivait par la montagne, pour la montagne »
Nicolas Terray et son père Lionel Terray. (photos : Lionel Cariou, Radio France ; photographie anonyme, collection du Musée dauphinois)

Nicolas Terray est un des deux fils de Lionel Terray. Ancien guide et moniteur de ski, il vit à Chamonix dans le chalet construit par son père dans les années 40. Avec son frère Antoine, il assistera au vernissage de l’exposition « Classe 21, une cordée centenaire ».

Le Crieur : Pouvez-vous nous parler de votre père ?

Nicolas Terray : C’est compliqué de parler de mon père car il est décédé quand j’avais sept ans. Je n’ai pas eu beaucoup l’occasion de parler avec lui. Il était beaucoup occupé, soit il était en expédition, soit il faisait son métier de guide, soit il était en conférence. Il n’était pas souvent disponible. J’ai quelques vagues souvenirs, des choses qui m’ont marqué. Je savais qu’il était guide et qu’il avait écrit un livre [Les Conquérants de l’inutile, en 1961, ndlr] mais j’ai réellement pris conscience de sa célébrité à son décès, à travers la télévision, les hommages, la une de Paris Match.

Quel rapport avait-il avec la montagne ?

La montagne, c’était sa vie ! Il vivait par la montagne, pour la montagne. La montagne était, entre guillemets, plus importante que sa vie familiale. C’était une passion et ça se voit dans les livres qu’il a écrits, dans les films qu’il a réalisés, dans ce que les témoins qui l’ont côtoyé racontent. On peut dire qu’il était marié à la montagne. Pourtant il est né à Grenoble dans une grande famille bourgeoise, mais qui avait une sainte horreur de la montagne. Sa famille trouvait que c’était un sport « dangereux et débile ».

Est-ce qu’il vous a transmis sa passion de la montagne ?

Disons qu’il n’y a pas un rapport direct. J’ai commencé à grimper vers 15 ans, ça me plaisait, mais je n’avais pas en tête de devenir un professionnel de la montagne. Après, j’ai fait quelques ascensions. Quelque part, je suis parti sur les traces de mon père… Je suis allé à l’Annapurna [Népal], au Piz Badile [Italie/Suisse], j’ai fait des grandes voies dans le massif du Mont-Blanc, l’Acongagua [Argentine], des endroits où mon père a été. Ce sont des endroits tellement magiques et uniques que je voulais y aller, déjà pour moi et après en souvenir de là où mon père était passé. Une sorte de parcours initiatique. Ce n’était pas de la nostalgie, plus de l’enthousiasme et de la curiosité. Mais se dire que son père est passé là 50 ans auparavant, ça procure des sensations spéciales !

Avez-vous pu voir l’exposition ?

J’ai été en contact avec ceux qui ont œuvré pour que cette exposition se fasse. Mais je ne voulais pas en savoir plus, pour garder un peu la surprise.

Outre Lionel Terray, l’exposition est aussi consacrée à Louis Lachenal et Gaston Rébuffat, compagnons de cordée de votre père. Les avez-vous connus ?

Lachenal est mort avant que je naisse mais j’ai connu Rébuffat. On ne se voyait pas beaucoup et je n’ai jamais grimpé avec lui. Quand j’ai commencé à grimper il n’était déjà plus tout jeune…

Cet article est issu du numéro 61 du Crieur de la Villeneuve, lui-même issu d’un numéro spécial du Crieur, réalisé le 11 septembre 2021 par F. M., 17 ans et habitant du Village Olympique, à l’occasion de la fête de quartier du VO et dans le cadre d’un chantier éducatif en journalisme.
Le but était de publier un numéro sur la fête de quartier, réalisé en une seule journée.
F.M. a été accompagné par Benjamin Bultel, journaliste au
Crieur de la Villeneuve, et Arnaud Billet éducateur au Codase.