Ciné-Villeneuve présente Nos mères, nos daronnes
Le film Nos mères, nos daronnes sera projeté lundi 5 mars, à 19 h 30 (photo : Bouchera Azzouz, une des deux réalisatrices, et sa mère, crédits : DACP)

Ciné-Villeneuve présente en projection, lundi 5 mars, à 19 h 30, à l’Espace 600, le film Nos mères, nos daronnes, de Bouchera Azzouz et Marion Stalens (qui sera présente pour un débat), dans le cadre du festival Les Dérangeantes. Thèmes abordés, synopsis, avis, Ciné-Villeneuve vous raconte tout sur le film.

Préambule

Le film est destiné au public adulte. Il est en accès libre, mais il n’est pas interdit de profiter de cette projection pour adhérer à Ciné-Villeneuve (adultes 5 €, soutien 10 €, enfants et précaires 1 € pour la saison 2017-2018).

Le film est présenté dans le cadre du festival « Les Dérangeantes » organisé pour la quatrième fois par Le Planning Familial 38 durant le mois de mars avec 14 projections à Grenoble dont deux à la Villeneuve (celui-ci et un film tout public à la maison des habitants des Baladins le 6 mars à 10 heures). À noter aussi qu’un autre film pour adultes sera diffusé au théâtre Prémol le mardi 13 mars à 14 heures. Le programme complet est disponible ici.

La projection de ce documentaire entre aussi dans le cadre des Arlequinades, l’événement festif et culturel du Patio (maison des habitants, bibliothèque Arlequin et associations hébergées au Patio) qui se déroule durant tout le mois de mars.

La date de projection de ce documentaire est liée à la Journée internationale des femmes du 8 mars (aussi appelée Journée internationale des droits des femmes, journée initiée aux États-Unis en 1909 et instaurée par l’Internationale socialiste en 1910).

Le sujet du film en quelques mots clés : portrait, banlieue, immigration, identité culturelle, famille, femme.

Un peu de vocabulaire : la « daronne », en argot issu du vieux français, c’est la mère, la patronne. Dans nos quartiers populaires les daronnes sont les femmes sur qui tout – ou presque tout – repose. Des sentinelles qui ne baissent jamais la garde. Mais que disent les dictionnaires ? Pour Le Robert : argot ancien : maître, patron ; argot moderne : père, mère, parents ; origine 1836. 1836 ? Alors allons voir Le Littré : mot vieilli « Le maître de la maison » qui est resté dans l’argot ; histoire : XIIIe siècle !

Le film

Dans la piscineComme l’écrit Erwan Desplanques, dans Télérama : «Pourquoi interroge-t-on toujours les jeunes dès qu’on filme la banlieue ? Où sont les aînés ? Qu’ont-ils à nous raconter ? Bouchera Azzouz a eu l’excellente idée d’aller rendre visite à sa mère franco-marocaine, dans son appartement de la Cité de l’amitié, à Bobigny, et d’interroger, filmée par Marion Stalens, ses voisines algériennes ou tunisiennes arrivées en France dans les années 1970, alors qu’elles étaient enfants. Sa mère, fil rouge du film, est montrée dans son intimité avec ses amies de toujours.

Issue d’un quartier populaire de la banlieue parisienne, inspirée par le parcours de sa mère et de ses voisines, Bouchera Azzouz veut découvrir qui sont ces femmes, définies avant tout à travers leur rôle de mère. Un rôle qu’elles endossent depuis si longtemps. Les jeunes les appellent les «daronnes», pour la société ce sont des «mères courage». Sans tabous, elles évoquent leur jeunesse, leurs combats intimes et leurs trajectoires, souvent mouvementées. Musulmanes, juives ou athées, amies au-delà de leur culture, elles ont su bousculer les traditions et les interdits de la société française des années 70, pour gagner leur liberté. »

L’éditeur présente ainsi le film : « Pour la première fois, des mères parlent de leur vie de femme, de leurs avortements, de leurs amours, de leurs enfants mais aussi de leurs rêves et de leurs projets ! Des mots rares par des gens qu’on entend rarement… Pour Rahma (mère de l’auteure Bouchera Azzouz), Sabrina, Yamina, Habiba, Zineb et Aline, ces confidences qu’elles livrent avec humour et émotion tissent le récit de leur combat vers l’émancipation et la liberté. »

Pour reprendre Télérama, « Ces mémoires vives de l’immigration livrent ici tout ce qu’elles n’ont jamais pu dire — la pauvreté, l’ignorance, l’interdiction de se maquiller ou d’aller à l’école. Et évoquent cet autre sujet dévastateur : l’absence de moyens de contraception. Ces femmes ont quasiment toutes avorté clandestinement, au moins une fois, afin d’éviter de reproduire le destin qu’on voulait leur imposer (un enfant par an pendant dix ans). Elles incarnent à ce titre une face discrète du féminisme, presque oubliée de la mémoire, la première génération à avoir œuvré pour l’émancipation, moins pour en profiter elle-même que pour transmettre cette liberté à la suivante. »

« Ce film est un hommage à toutes celles qui incarnent le féminisme populaire. Mères de familles, souvent femmes au foyer, mais aussi institutrices ou assistantes sociales, elles ont su bousculer les traditions et gagner leur indépendance au goutte à goutte, sans fracas, dérivant des voies toutes tracées auxquelles elles étaient destinées. Il peut se voir comme un hommage — délivré avec beaucoup de sensibilité, de douceur — d’une jeunesse affranchie du poids de la tradition, qui célèbre le combat des « daronnes », ces silencieuses mères Courage qui demeurent les « piliers de la cité ». Une œuvre d’une grande force et d’une grande sincérité, résolument optimiste, qui montre que les femmes sont la grande chance des quartiers populaires contre la radicalisation et le terrorisme. », écrit Osez le féminisme 59 à propos du film.

Les réalisatrices

Marion-StalensMarion Stalens : Née sous le signe du théâtre, avec des parents tous deux metteurs en scène, Marion Stalens devient comédienne et participe pendant une dizaine d’années aux créations de la troupe du Chapeau Rouge. Parallèlement elle est aussi photographe et s’intéresse à la relation entre acteurs et réalisateurs, et en particulier au travail de sa sœur, l’actrice Juliette Binoche. Qu’elle photographie des personnalités ou des inconnus, elle cherche toujours à capter la vérité d’une rencontre, et la grâce singulière de chacun.

Dans ses documentaires (14 aujourd’hui), Marion Stalens explore de façon personnelle des sujets de société qui lui tiennent à cœur : la condition des femmes, l’immigration, le handicap, l’Afrique, la liberté d’expression, la création artistique. Elle fait souvent appel à l’imaginaire et au monde des arts pour éclairer le réel (théâtre, cinéma, danse, peinture, écriture).

« Comment faire pour vivre ensemble, quand on est différents ? » est la question qui traverse l’ensemble de son travail. Sans complaisance et sans naïveté, elle cherche des raisons d’espérer.

Les films de Marion Stalens ont été diffusés entre autres sur France 2, France 3, Arte et Canal+.

Bouchera Azzouz : Née à Saint-Denis, elle a grandi à Bobigny au début des années 70. Troisième d’une fratrie de 10 enfants, elle endosse très jeune la fonction « d’adjoint-mère » qui va forger, depuis l’enfance, sa curiosité au monde et plus particulièrement à la condition des femmes immigrées. Cette prise de conscience qu’être « femme » est une épreuve de tous les jours va structurer avec les années une approche empirique du « féminisme » qui deviendra à force de luttes et de réflexion, le « féminisme populaire ».

Après le documentaire, elle écrit en 2016 avec Caroline Glorion Fille de daronne et fière de l’être. Ce livre est disponible à la Bibliothèque de d’Arlequin au Patio. Elle est aussi co-auteur avec Corinne Lepage du livre Les femmes au secours de la République, de l’Europe et de la planète.

Elle a été secrétaire générale du mouvement « Ni putes ni soumises ». Elle est maintenant présidente de l’association « Atelier du Féminisme Populaire ». L’action principale de cette structure est de donner aux femmes les moyens de leur émancipation au travers du PAAF, Plan d’Accompagnement à l’Autonomie des Femmes. Depuis octobre 2017, elle est membre du conseil d’administration de l’Institut National de l’Audiovisuel (INA).

En préparation d’un prochain film pour France Télévisions On les appelait beurettes, elle prolonge son analyse des quartiers et poursuit sa relecture féministe de l’histoire.

Pour en savoir plus

Pour ceux qui n’auront pas la chance de voir ce documentaire à l’Espace 600, il est visible en entier ici : http://lab-imagesdeladiversite.cget.gouv.fr/?q=content/Nos-m%C3%A8res-nos-daronnes ou là : https://www.youtube.com/watch?v=alXYK8mNld0

Un débat de 49 minutes avec les auteurs à l’Institut du Monde Arabe, dans le cadre des jeudis de l’IMA, peut être écouté sur : https://www.franceculture.fr/conferences/institut-du-monde-arabe/nos-meres-nos-daronnes-un-combat-si-discret ou https://www.youtube.com/watch?v=jPfCkr4EQeQ

 

Nos mères, nos daronnes
Documentaire, France, 2014
De Bouchera Azzouz et Marion Stalens
52 min

 

Mise à jour du 14 mars 2018 : suppression de la référence à l’officialisation de la journée internationale des femmes en 1977 par l’ONU et ajout de l’instauration d’une journée internationale des femmes par l’Internationale socialiste en 1910.