Ciné-Villeneuve présente Le Miracle du saint inconnu
Le film Le Miracle du saint inconnu, d’Alaa Eddine Aljem, sera projeté lundi 11 avril, à 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins.

Ciné-Villeneuve projette, lundi 11 avril, à 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins, le film Le Miracle du saint inconnu, d’Alaa Eddine Aljem. Thèmes abordés, synopsis, avis, Ciné-Villeneuve vous raconte tout sur le film.

Le film

Le Miracle du saint inconnu est le premier long métrage d’Alaa Eddine Aljem. Ce beau conte ubuesque narre les péripéties d’un voleur dont le butin enterré a été recouvert par un mausolée.

Au beau milieu du désert, Amine court. Sa fortune à la main, la police aux trousses, il enterre son butin dans une tombe bricolée à la va-vite. Lorsqu’il revient dix ans plus tard, l’aride colline est devenue un lieu de culte où les pèlerins se pressent pour adorer celui qui y serait enterré : le Saint Inconnu. Obligé de s’installer au village, Amine va devoir composer avec les habitants sans perdre de vue sa mission première : récupérer son argent. Le film est construit à partir d’un fait réel : au Maroc un villageois possédait un âne qu’il adorait. À sa mort, il a voulu lui donner une sépulture. Bien sûr, il ne pouvait pas l’enterrer dans le cimetière des villageois, alors il l’a fait plus loin, à la sortie du village. Plus tard, des gens ont construit un mausolée au-dessus de sa tombe, et c’est devenu un saint très connu dans le pays, même si on sait qu’en fait il s’agit d’un âne… Dans le film ce n’est pas un âne, mais un sac rempli d’argent, ce qui permet par ailleurs d’intégrer une notion de rapport à l’argent et jusqu’où on est prêt à aller pour lui, en faisant passer le personnage par tout un tas d’obstacles, de dilemmes et de remises en question, autour de la religion, la croyance, la foi, la culture et les valeurs du village local.

C’est un premier film et beaucoup y ont vu à sa sortie beaucoup de potentiel. La mise en scène très posée, symétrique et très évocatrice fait penser au film d’humour absurde d’Elia Suleiman (réalisateur, scénariste et acteur palestinien né en 1960 à Nazareth) It Must Be Heaven. Là aussi, Le miracle du saint inconnu emprunte l’absurde, le burlesque, le silence et l’observation des personnages pour, non pas dénoncer véritablement, mais plus questionner certains points de vue et comportements établis. La religion, la politique, la justice sont des thèmes abordés dans le film mais toujours de façon subtile et drôle via des scènes comiques de situation plus que par le dialogue, sans jamais dénoncer frontalement. C’est très bien fait.

Dans sa critique, le magazine Cinema Teaser indique : « Par sa galerie de personnages idiots ou acariâtres, Le Miracle du saint inconnu est comme un film des frères Coen (cinéastes américains nés en 1954 et 1957) qui aurait été revisité à la sauce marocaine. La poisse et la médiocrité y jouent un rôle déterminant. Le comique de répétition y est parfaitement maîtrisé. » et « Il fallait se douter qu’il y aurait une moralité : avec ses contre-jours à la lumière de la lune, comme des ombres chinoises, on avait cru reconnaître l’apanage visuel des livres de contes illustrés. Mais ce n’est pas parce que c’est enfantin, que ce n’est pas diablement malin. »

Trigon-film, la société distributrice du film, indique : « L’économie de moyens utilisés pour réaliser un film cache souvent des richesses insoupçonnées. Ce pourrait être là Le Miracle du saint inconnu. A l’instar du Finlandais Aki Kaurimäski, Alaa Eddine Aljem ne s’embarrasse pas en portraiturant ses personnages en profondeur. Ils sont là, tout simplement, mais bien là, et leur présence emplit l’écran, donne du corps à un récit qui n’arrête pas de nous surprendre.

« Voici donc le malfrat Amine de retour au pied de la colline pour voir sa cache cachée par un monument. Le coin désertique est maintenant occupé par un village qui attend les touristes et les pèlerins. Habité par des personnages qu’on croirait sortis d’un cartoon signé Tex Avery – coiffeur faisant office de dentiste, un couple médecin-infirmier des plus improbables, sans oublier le gardien du mausolée et son chien aux dents d’or. Burlesques souvent, ces personnages sont empreints d’une profonde humanité. Même Amine laisse entrevoir des sentiments. On ne s’étonne pas, alors, de l’apparition,de deux personnages tragiques – Brahim et son fils. Le père persiste à cultiver une terre aride sous un soleil de plomb, persuadé que la pluie reviendra, mais le seul tonnerre qu’on entende vient de la dynamite utilisée pour ouvrir une route. Le fils aimerait bien qu’il abandonne cette terre ingrate.

« Alaa Eddine Aljem manie la dérision, dynamitant, au sens propre comme au figuré, les croyances d’une époque tourmentée. Métaphore pertinente de notre temps, que ce mausolée en fait construit sur de l’argent, lui-même le produit d’un vol. Si l’on rit beaucoup, on est aussi touché par le destin de ces petites gens. Ici, comme chez Kaurimäski, l’absurde et le burlesque sont au service de l’émotion et de la réflexion. Un vrai « think good movie ». »

Le journal Libération indique dans sa critique : « L’intrigue se développe dans un cadre qui, n’étaient la sécheresse rurale et l’ancrage géographique, rappellerait un peu ces capitales de l’ex-bloc communiste où poussent aussi et à vitesse grand V toutes sortes de monuments flambant neufs dédiés à des dictateurs nouveau style, les cultes n’étant, comme on sait, pas toujours indexés à la religion mais s’épanouissant généralement dans le vide. La caméra enregistre merveilleusement ce paysage d’opérette, se plaçant toujours à bonne distance pour faire de la colline soit un Everest, soit un ridicule monticule de bande dessinée, en renfort du charme vaguement Tati de l’ensemble, hors du temps, voire bloqué dans un interrègne.

« Si les péripéties décrites par le Miracle du saint inconnu sont résolument loufoques, la mise en scène, elle, se montre tout en retenue, pleine de silences et de temps morts qui soulignent le pur comique de situations reposant, non pas sur le ridicule de chacun – le film n’étant absolument pas moqueur, et les personnages n’existant que par et pour leur fonction narrative -, mais sur le recul offert par des respirations qui permettent d’envisager la folie avec sagesse. Le ton du film est un peu celui d’un conte du Turc Nasr Eddin Hodja, le fou qui était sage et dont le mausolée serait vide. »

Le réalisateur : Alaa Eddine Aljem

Né à Rabat (Maroc) le 29 novembre 1988, Alaa Eddine Aljem étudie le cinéma à l’ESAV (École supérieure des arts visuels) à Marrakech puis à l’INSAS (Institut national supérieur des arts du spectacle et des techniques de diffusion) à Bruxelles en master réalisation, production et scénario. Il travaille pour le cinéma et la télévision en tant que scénariste et assistant réalisateur avant de fonder avec Francesca Duca, Le Moindre Geste, une société de production basée à Casablanca. Il réalise plusieurs courts-métrages de fiction dont Les Poissons du désert en 2015 qui remporte le grand prix du meilleur court métrage, le prix de la critique et du scénario au Festival national du film au Maroc et est sélectionné dans de nombreux festivals internationaux. Le Miracle du saint inconnu est son premier long métrage en coproduction franco-marocaine, tourné à Marrakech. Lors du développement le projet, Alaa participe à Open Doors de Locarno et y remporte le prix ICAM (Investing in Culture & Art in the South Mediterranean), au Screenwriters’ Lab du Sundance Institute et à La Fabrique des Cinémas à Cannes en 2016 et il est sélectionné lors de la 58e Semaine de la Critique.

Les acteurs

Youness Bouab (le voleur) : acteur et exceptionnellement scénariste marocain né en 1979. Il grandit à Rabat où il fait ses études secondaires et découvre le théâtre. Il décroche son baccalauréat en lettre et part pour la Sorbonne à Paris. Younes Bouab en sortira quelques années plus tard avec une maîtrise en philosophie. Il reprendra contact avec le théâtre durant ses dernières années à Paris. Depuis 2012 il a participé à 15 films et six téléfilms.

Salah Bensalah (le cerveau) : il a fréquenté l’Académie supérieure des arts de la scène de Rabat et étudié le théâtre pendant quatre ans. Il a tourné dans 11 films depuis 2009.

Fiche technique

  • Titre original : سيد لمجهول
  • Réalisation et scénario : Alaa Eddine Aljem
  • Musique : Amine Bouhafa
  • Photographie : Amine Berrada
  • Montage : Lilian Corbeille
  • Son : Yassine Belouquid, Paul Jousselin, Matthieu Deniau
  • Décors : Kaoutar Haddioui
  • Acteurs : Youness Bouab, Salah Bensalah, Bouchaib Essamak
  • Production : Francesca Duca, Alexa Rivero
  • Pays d’origine : Maroc
  • Langue : arabe, la version présentée est sous-titrée en français (il existe des sous-titrages en plusieurs langues)

Critiques

Le site AlloCiné rapporte 41 critiques de spectateurs et une moyenne de 3,2 sur 5 pour les notes. Quelques extraits de critiques de la presse :

Positif par Olivier De Bruyn – Note 5

« Avec un sens de l’épure discrètement impressionnant, un humour à toute épreuve et, surtout, une inspiration constante dans sa mise en scène, Alaa Eddine Aljem signe une fable burlesque qui stigmatise avec une même impertinence l’obscurantisme idéologique et les névroses mercantiles. »

Le Nouvel Observateur par François Forestier – note 3

« Dans ce Clochemerle marocain règne une folie douce, une bienveillance touchante. Le vrai miracle du titre, c’est de s’attaquer à un sujet hautement explosif – la religion – et de s’en sortir avec le sourire. »

Les Fiches du Cinéma par Keiko Masuda – Note 2

« Ce premier film est une comédie au tempo kaurismäkien (référence à un cinéaste finlandais aux films loufoques et musicaux) dans le désert marocain. Le réalisateur y caricature un lieu de pèlerinage, les habitudes et les superstitions bien ancrées, à travers de multiples personnages, mais le tout à un petit goût d’inachevé. »

La bande-annonce

Le Miracle du saint inconnu (سيد لمجهول)
Comédie dramatique (Maroc), 2019
D’Alaa Eddine Aljem
Avec : Younes Bouab, Salah Bensalah, Bouchaib Essamak
100 min
Version originale (arabe) sous-titrée en français
Projeté le lundi 11 avril à 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins (85 galerie des Baladins)
Adhésion à Ciné-Villeneuve : enfants et précaires : 1 € ; adultes : 5 € ; soutien : 10 € ; donnant droit à tous les films de la saison 2021-2022 hors Espace 600. Pour rappel, l’adhésion 2020-2021 reste valable en 2021-2022.