Éducs à gogo pour Échirolles
La place de la Convention, dans le quartier des Essarts, à la Ville Neuve d’Échirolles. (photo : BB, Le Crieur de la Villeneuve)

Six nouveaux éducateurs de rue viendront prochainement renforcer la prévention spécialisée à la Ville Neuve d’Échirolles. Mais rien pour la Villeneuve de Grenoble.

Début avril, Nadia Hai, ministre de la Ville, a annoncé que des « bataillons de prévention » seraient déployés d’ici l’été dans les « quartiers de reconquête républicaine » (QRR), un zonage du ministère de l’Intérieur. Bien que l’État continue d’utiliser un vocabulaire guerrier pour parler des quartiers populaires, 300 éducateurs et autant de médiateurs vont être recrutés. Échirolles a tiré le gros lot : la Ville Neuve (Les Essarts et Surieux) testera le dispositif de renfort de la prévention spécialisée. Les trois éducateurs de rue de l’Apase, l’association qui gère la prévention spécialisée à Échirolles, seront rejoints par six nouveaux d’ici l’été, ainsi que par trois médiateurs.

Mais seule la Ville Neuve d’Échirolles sera concernée, alors que le QRR regroupe les deux Villeneuves, à Grenoble et Échirolles. Alors, pourquoi seulement Échirolles ? « C’est un choix du national, pas de la préfecture de l’Isère. », explique Juliette Beregi, sous-préfète déléguée à la politique de la Ville. « Il y avait plusieurs critères : être en QRR ; avoir une taille suffisante ; un besoin de renforcement des équipes ; un fort taux de décrochage scolaire. Clairement, Échirolles est en tête. Il y a aussi un intérêt pour l’évaluation, cela permet de comparer deux quartiers jumeaux : un qui est renforcé [à Échirolles] et l’autre non [à Grenoble]. »

Apase et Codase
Deux associations œuvrent dans le domaine de la prévention spécialisée dans l’agglo : l’Apase (Association pour la promotion de l’action socio-éducative), fondée en 1970, installée à Fontaine ; et le Codase (Comité dauphinois d’action socio-éducative), fondé en 1954, installé à Grenoble. Elles se partagent le territoire : grosso modo, au Codase la ville-centre (dont la Villeneuve), à l’Apase la banlieue. Auparavant compétence du département, la prévention spécialisée a été transférée à la Métro en 2017.

Pourtant, lors des premières annonces de l’État, l’Apase et le Codase (voir encadré ci-contre) avaient fait des propositions pour que les éducs en renfort soient répartis dans les équipes peu fournies de l’agglo. Sans succès. En novembre 2020, Renzo Sulli, le maire d’Échirolles, a signé, comme une centaine d’autres maires, mais pas Éric Piolle, une lettre ouverte au président de la République pour réclamer qu’une partie du plan de relance soit dédiée aux quartiers populaires. L’État a-t-il voulu récompenser Renzo Sulli d’avoir mouillé la chemise ? En tout cas, la préfecture reconnaît que « sur ce projet [de renforcement des équipes de prévention], la communauté d’élus est très intéressante. » La mairie de Grenoble regrette ce choix : « Cette localisation a été décidée par les services de l’État. […] [Elle] a été imposée avant même qu’un dialogue s’établisse entre métropole et communes. »

Une éducatrice très au fait du dossier reste sceptique sur le dispositif : « C’est obligé que ça parte en live : les neuf éducs, plus trois médiateurs, plus Zeus [agents de sécurité déployés par les bailleurs sociaux, ndlr] vont se marcher dessus… » Et rappelle qu’il y a deux ans d’attente pour une mesure d’aide éducative. Oublié du « Ségur de la santé », le secteur médico-social enchaîne les grèves depuis décembre 2020 pour réclamer plus de moyens.