Jeunes danseurs de la Villeneuve
La compagnie Les Mutins, lors de la représentation de Sólarsteinn. De gauche à droite : Marius Brumelot, Tom Lévy Chaudet, Félix Juillaguet, Lucie Veslin, Nolwenn Mailloux et Mélina Damiano. (photo : Laurence Fragnol)

Vendredi 22 janvier, à l’Espace 600, trois compagnies de jeunes danseurs sont venues montrer leur travail chorégraphique de l’année. Les Mutins de la Villeneuve et les Juniors, leurs acolytes du Pacifique (aux Alliés), ainsi que leur chorégraphe Jackie Simoncelli, avaient invité les 16 Danseurs sans frontières (DSF) de Rillieux-la-Pape en banlieue de Lyon. Rencontre avec deux des danseurs de la compagnie des Mutins.

Sólarsteainn (Les Mutins) : Habillés tout de blanc, trois filles et trois garçons se lancent dans un voyage à plusieurs directions. Si parfois un unisson les rassemble, ils finissent par dévier. Les uns aux autres, ils se renvoient des reflets dissemblables. Sur des musiques d’Oasis, de Tom Waits et même de Bach, ces mille chemins les conduisent pourtant, comme à bord d’un château ambulant, à trouver ensemble quelque moment sacré.

Turbulences (Les Juniors) : Sagement assis sur leurs cubes, les danseurs multicolores observent le vide commun. Puis ils envahissent l’espace comme des frissons, des bouillonnements. Parfois, un rythme les emporte autour de quelques gestes sur des morceaux de The Knife, Nick Cave, Asaf Avidan… Mais les cubes se resserrent, se montent en labyrinthe. C’est par la mosaïque qu’ils domptent ces trouble-fêtes.

Nœuds (DSF) : La danse urbaine pulse entre leurs mains. Ils s’enchaînent et se déchaînent, ils se passent les énergies comme des corps qui slament. L’un tournoie au sol et l’autre s’envole.

Mutins et Juniors se retrouvent régulièrement pour danser ensemble, rencontrer des chorégraphes, des musiciens ou des plasticiens lumière. Ils travaillent depuis septembre 2014 à cette pièce — Sólarsteinn —, issue d’un roman de Béatrix Beck sur le thème de la pierre de soleil qui dédouble l’image pour trouver le Nord. À partir de séquences musicales, ils choisissent des consignes d’improvisation comme autant de manières de se parler par la danse. D’une représentation à l’autre, ils peuvent ainsi évoluer et toujours réinventer.

« Le plus important dans cette compagnie, c’est la liberté qu’elle donne. »

Tom Lévy Chaudet, de la compagnie Les Mutins, lors de la représentation de Sólarsteinn. (photo : Eric Grospeillet)

Tom Lévy Chaudet, de la compagnie Les Mutins, lors de la représentation de Sólarsteinn. (photo : Eric Grospeillet)

Rencontre avec Tom Lévy Chaudet : Lui danse depuis six ans dans la compagnie, tantôt du côté des Juniors, tantôt du côté des Mutins, selon les créations, l’intérêt et les personnalités des danseurs. Il y rentre alors qu’il est en 5e, au collège ; il passe le bac en 2015 et se consacre à la danse cette année. Il y a deux ans, il s’initie au fonctionnement de cette association installée à la Villeneuve en en prenant la présidence, suite au départ d’un autre danseur parti faire ses études ailleurs. Aux côtés de Tom Lévy Chaudet, des ex-Mutins : « Ce qui importe le plus pour cette compagnie, c’est la disponibilité et l’envie, l’engagement et non le niveau technique. »

La scène, en intérieur ou en extérieur, sera le lieu d’un apprentissage immense sous le regard du public. Tom apprécie particulièrement l’inventivité que permet le travail d’improvisation. Il cherche, à travers « ces histoires de rencontres sans mots », une justesse de ce qui se dit. Et tous progressent ensemble pour rester spontanés et se battre contre les censures du corps et des idées.

« Nous ne cherchons pas à raconter. Nous ne nous préoccupons pas de thèmes. »

Lucie Veslin, de la compagnie Les Mutins, lors de la représentation de Sólarsteinn. (photo : Eric Grospeillet)

Lucie Veslin, de la compagnie Les Mutins, lors de la représentation de Sólarsteinn. (photo : Eric Grospeillet)

Rencontre avec Lucie Veslin : Peut-être l’avez-vous entendue chanter avec les musiciens d’In Situ. Elle est aussi une des deux danseuses des Mutins — qu’elle a rejoint il y a six ans et demi — qui habitent à la Villeneuve. Lucie a rejoint la compagnie après que Jackie est venue animer des ateliers de danse dans son école, après les cours.

Dans la compagnie, « les danseurs créent leurs propres mouvements ». Cela devient de la matière à travailler. Il ne s’agit pas d’un cours mais de création personnelle, « qui n’a pas pour but de se faire aimer de ceux qui regardent. »

Elle affirme que « sans les autres, on ne peut rien faire. Chacun est important. » Elle ressent la force du groupe dans l’acte de créer ensemble à partir de ce qu’ils possèdent déjà. Parfois, ils s’inspirent de références extérieures au groupe, vont voir beaucoup de spectacles ensemble, regardent du matériau sonore ou chorégraphique qu’apporte Jackie. Pourtant, « il n’y a pas d’obligation, il n’y a pas de règles qui doivent s’appliquer à chaque répétition. » Ils arrivent alors à beaucoup de détente sans attentes. La compagnie occupe une grande part de la vie de Lucie, qui veut plus tard travailler dans la médiation culturelle, pour donner à tous la possibilité de voir des spectacles.

Une longue histoire de complicité

Certains ambitionnent de continuer la danse en tant que professionnel, comme Tom, en intégrant des écoles supérieures de danse françaises ou étrangères. D’autres, comme Lucie, arrêtent la danse lorsqu’ils quittent les Mutins, s’étant laissés porter par ce groupe amical et ayant grandi avec lui.

Les Mutins répètent tous les mercredis après-midi à la salle 150. À ceux qui auraient envie de les découvrir, ils repartent bientôt pour une nouvelle création.