Ciné-Villeneuve présente Femmes au bord de la crise de nerfs
Le film Femmes au bord de la crise de nerfs, de Pedro Almodóvar, sera projeté le lundi 17 février, à 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins. (photo : image extraite du film)

Ciné-Villeneuve présente en projection, lundi 17 février, à 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins, le film Femmes au bord de la crise de nerf, de Pedro Almodóvar. Thèmes abordés, synopsis, avis, Ciné-Villeneuve vous raconte tout sur le film.

Synopsis

Avec six cent mille spectateurs en France, il s’agit du premier succès international du cinéaste espagnol, Pedro Almodóvar Caballero, qui signe alors son septième long métrage et dix-septième film en comptant les courts-métrages.

Affiche espagnole du film.

Au départ, Femmes au bord de la crise de nerfs est envisagé comme une adaptation de La voix humaine de Jean Cocteau (pièce de théâtre en un acte déjà adapté au cinéma par Roberto Rosselini en 1947-48 dans Amore). Mais le monologue de la femme abandonnée par son amant n’étant pas suffisamment long pour en faire un film, Pedro Almodóvar imagine les 48 heures qui précédent l’abandon. Pedro Almodóvar aurait également emprunté une scène à la vie privée d’une amie : Candela (Maria Barranco) fuit la police qui pourchasse son amant terroriste islamiste.

Tout l’univers d’Almodóvar est là : les couleurs exubérantes, avec toujours une dominante, le rouge sang, de brèves touches violentes d’humour, l’obsession pour les talons d’escarpins claquant au sol, les perversions sexuelles, les héroïnes blessées mais indomptables… Librement inspiré de La voix humaine, le récit est orchestré autour d’un élément central, le téléphone, instrument du malentendu et de l’incommunicabilité, tour à tour gag, arme, menace ou promesse. Carmen Maura, égérie des premières années, trouve ici un rôle à sa mesure, entre le rire et les larmes.

Image extraite du film.

Actrice de doublage, Pepa vient de se faire plaquer par son amant et partenaire, Iván. Elle met le feu à son lit, pile des somnifères dans le gaspacho et… coup de sonnette : le propre fils d’Iván et sa fiancée, Marisa, viennent visiter l’appartement qu’elle a décidé de louer. Les événements ne cessent de s’enchaîner … Pepa rencontre continuellement des personnes proches de son ancien amant. Malheureusement, elle ne parvient pas à lui remettre la main dessus… Coup de sonnette : Candela, une amie, débarque, affolée — son dernier béguin, un terroriste, doit faire sauter un avion, justement celui que va prendre Iván avec sa nouvelle maîtresse. Coup de sonnette : Lucía, la femme d’Iván, surgit avec un revolver.

Fiche technique

Scénario et réalisation : Pedro Almodóvar Caballero.
Actrices et acteurs principaux : Carmen Maura, Antonio Banderas, Julieta Serrano, Rossy de Palma.
Note : Après la fin du tournage, Pedro Almodóvar a rejeté l’actrice Carmen Maura, sa muse depuis Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier, pour des raisons qui restent encore mystérieuses. Il faudra attendre 17 ans et le tournage de Volver en 2005 pour que les deux artistes renouent.
Musique : Bernardo Bonezzi.

Disctinctions

Ce film a notamment remporté le prix du meilleur scénario lors de la Mostra de Venise 1988, le prix du public au festival de Toronto 1988, et cinq prix Goya en 1989 (récompenses de cinéma décernée chaque année depuis 1987 par l’Academia de las artes y las ciencias cinematográficas de España – Académie des arts et des sciences cinématographiques d’Espagne). Sélectionné parmi les meilleurs films étrangers de l’année dans plusieurs pays, il a particulièrement été nommé pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère en 1989.

Le réalisateur : Pedro Almodóvar

Pedro Almodóvar, en 1988, à la sortie du film. (DR)

Pedro Almodóvar Caballero a tenu à peu près tous les rôles dans le cinéma. Réalisateur d’abord, de 35 films, dont 13 courts métrages. Il a été le scénariste de tous ses films, quelques fois inspiré par des œuvres littéraires. Il a été acteur dans cinq de ses films (de 1980 à 1986) et il a été lui-même dans cinq documentaires (de 1991 à 2008), tous relatifs au cinéma. Il a participé à la réalisation de la bande son de trois de ses films. Dans un de ses films il a été le chef décorateur (Le labyrinthe des passions, 1982 film où il a été aussi le réalisateur, le responsable de la bande son et acteur).

Né probablement le 24 septembre 1949, sa date de naissance reste incertaine, Pedro Almodóvar Caballero est issu d’une famille relativement pauvre de muletiers d’une région ravagée par la Guerre d’Espagne. Il grandit entouré de femmes, ce qui ne sera pas sans conséquence sur son cinéma. Élève particulièrement doué, il étudie chez les Pères Salésiens et les Franciscains, une expérience douloureuse pour lui qui lui fera perdre la foi et motivera une certaine aversion pour la religion. Pour se détendre et sortir du carcan strict de cette éducation, il fréquente assidûment les salles obscures.

À 17 ans, il part pour Madrid, seul, sans argent et sans travail, avant d’entamer un tour d’Europe qui le mène à Londres et à Paris. Il souhaite ainsi apprendre le cinéma, mais, l’École Officielle du Cinéma avait été fermée par Franco. Après plusieurs petits boulots, il décroche un emploi de bureau à la Compagnie nationale espagnole de téléphone où il reste douze ans. Parallèlement, il écrit des scénarios, tourne, de 1974 à 1979, des courts-métrages en Super 8, fait la connaissance de Carmen Maura, ce qui l’entraîne à faire du théâtre au sein de la troupe indépendante « Los Goliardos », où il montre un goût certain pour le travestissement, et fonde un groupe punk-rock parodique « Almodovar y McNamara ». Au retour de la démocratie en Espagne, il réalise son premier long métrage avec Carmen Maura, Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier, film tourné en 16 mm, avec un budget dérisoire. Alors que le mouvement culturel la Movida se développe, il tourne Le Labyrinthe des passions et Matador qui révèlent Antonio Banderas. Scénariste et réalisateur, il ajoute une corde à son arc en 1986, en fondant avec son frère Agustin Almodovar (qui abandonne sa carrière d’ingénieur chimiste), la société de production El Deseo (le désir). Le premier film produit par la société est La Loi du désir (sixième long métrage du cinéaste) en 1987 et par la suite, tous les films de Pedro Almodóvar seront produits par cette société.

Ce dernier prouve qu’il peut être omniprésent sur un projet en enfilant également les costumes de chef décorateur et de compositeur. À l’instar de son frère, il lui arrive même de faire quelques apparitions hitchcockiennes dans certains de ses films, comme dans La Loi du désir.

Baroque, adepte du kitsch et de la parodie, Pedro Almodóvar se fait un nom au-delà des frontières espagnoles avec Femmes au bord de la crise de nerfs, en 1988. Le cinéaste se montrant fidèle à ses acteurs, son cinéma est truffé de figures récurrentes, parmi lesquelles Carmen Maura, Victoria Abril, Penélope Cruz, ou encore Antonio Banderas, seule icône masculine de la filmographie de ce « réalisateur à femmes ». Ce dernier se montre également assidu à Cannes, qu’il visitera à six reprises : 1992 (membre du jury), 1999 (en compétition avec Tout sur ma mère), 2004 (La Mauvaise éducation projeté en ouverture), 2006 (en compétition avec Volver), 2009 (en compétition avec Étreintes brisées) et 2011 (en compétition avec La Piel que Habito).

Enfant de la movida nourri aux telenovelas, Pedro Almodóvar a toujours revendiqué un goût pour l’artifice aux grosses ficelles et ne s’est jamais vraiment préoccupé de la vraisemblance de ses scénarios.

Notes :

  • Le terme movida vient de l’espagnol « hacer una movida » qui signifiait alors quitter le centre de Madrid pour s’approvisionner en drogues de tous genres et revenir le consommer dans la capitale. Il a été donné au mouvement culturel créatif qui a touché l’ensemble de l’Espagne au début des années 1980, pendant la fin de la période de la transition démocratique espagnole, après la mort de Franco.
  • Les telenovelas, sont les feuilletons télévisés en Espagne et Amérique latine, composés d’environ 200 épisodes d’une quarantaine de minutes qui sont diffusés tous les soirs du lundi au vendredi pendant sept à huit mois.

Critiques

Le film reçoit, en France un bon accueil. Le site AlloCiné (www.allocine.fr) confère au film une note moyenne de spectateurs de 3,6 avec 1295 notes et 83 critiques. Le site ne donne pas comme il le fait pour les films récents un résumé des critiques de presse.

Critique de Télérama (note deux T sur trois) : « Comédie burlesque oscillant entre somnolence et hystérie, gaspacho et revolver, saccage et découverte de soi. Des filles et des valises ! Servir une goulée de névroses pour tromper son vaudeville : entre passions et hystérie, la voix s’y double, l’émoi se trouble. Ovaires à vif. Pour ce très bon gaspacho préparé avec soin et malice par notre cher Pedro. Exubérance et solitude. Sur le fil du rasoir entre sensibilité et outrance, un joli panel pimenté de la féminité selon Almodovar. Almodovar au rythme un peu fou et à l’esthétique 80’s, emmené par le charisme de Carmen Maura vers le plaisir sans borne de son spectateur. On est excité devant ce film de Pedro Almodovar où ses personnages s’entrechoquent et se révèlent. Grand film humoristique. »

Critique de spectateurs de AlloCiné : (Note 5 sur 5) « Pedro Almodovar est sûrement l’un des meilleurs réalisateurs du monde, peut-être le meilleur. Mais ça, on le savait déjà. Si ce film a reçu autant d’éloges, c’est qu’il est bon. De bons acteurs Carmen Maura, Antonio Banderas ou encore Rossy de Palma. On n’aura rien à redire sur le choix des acteurs. 15 ans après le régime franquiste, ce film présente les traits de cette Espagne en proie au changement. Almodovar dans une histoire simple et banale d’une rupture mêle les personnages entre eux avec un jeu de caméra extrêmement bon et très réfléchi. Pour le reste, chaque scène apporte quelque chose sur cette culture espagnole, à noter tous les petits détails du film qui est un jeu du cinéaste : Tableau de Picasso avec la tête de Rossy de Palma dans un miroir cassé, une vieille femme qui fait de la corde à sauter ; bref, Almodovar montre ce qu’il lui plaît, et se moque à merveille des taxis, de la publicité, du cinéma américain. Le film est donc comique, sympathique avec un petit supplément d’âme, un bon cinéma espagnol réaliste qui nous change des films américains masqués par le mascara et masquant l’atypique. « 

NOTE 4,5 sur 5 : « C’est une comédie. On peut la trouver un peu sage puisqu’elle ne contient aucune des audaces auquel l’auteur nous a habitués depuis, mais elle est excellente et réalisé de main de maître. C’est un vaudeville loufoque avec des personnages plus farfelus les uns que les autres (le chauffeur de taxi omniprésent, le dragueur fou, la féministe hypocrite et bien sûr les femmes qui, comme l’indique le titre, sont toutes au bord de la crise de nerf). »

La bande-annonce

Femmes au bord de la crise de nerfs (Mujeres al borde de un ataque de nervios)
Comédie (Espagne), 1988
De Pedro Almodóvar
Avec Carmen Maura, Antonio Banderas, Julieta Serrano
88 min
Lundi 17 février, 20 heures, à la salle polyvalente des Baladins, 85 galerie des Baladins
Adhésion à Ciné-Villeneuve : enfants et précaires : 1 € ; adultes : 5 € ; soutien : 10 € ; donnant droit à tous les films de la saison 2019-2020, hors projections à l’Espace 600.