Ciné-Villeneuve présente Drôle de drame
Drôle de drame, film de Marcel Carné, sera projeté lundi 29 février à 20 heures à la salle polyvalente des Baladins. (photo : image extraite du film)

Ciné-Villeneuve présente en projection, le lundi 29 février, le film Drôle de drame, de Marcel Carné, sur un scénario et des dialogues de Jacques Prévert, sorti en 1937. Thèmes abordés, synopsis, avis, Ciné-Villeneuve vous raconte tout sur le film.

Le film

Londres 1900. Le très sérieux professeur de botanique Irwin Molyneux n’est autre que Félix Chapel, auteur de romans policiers. L’évêque de Bedford, cousin d’Irwin, n’apprécie guère ce genre de littérature et le déclare bien fort lors d’un souper où il est invité chez les Molyneux. L’absence de Margaret, la femme de Molyneux, à ce souper, va déclencher une série de quiproquos forts amusants.

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Affiche du film

Sans doute le meilleur Carné-Prévert parce que ça ne se prend pas au sérieux et que ce film, pourtant parfaitement maitrisé, ressemble à une longue partie de chamboule-tout dans laquelle personne ne reste à sa place, chacun confond tout le monde en croyant tromper tout le monde. Les acteurs sont exceptionnels, les répliques fusent et les situations burlesques s’enchaînent. « Mais ça ne tient pas debout ! » s’écrie le chœur de ceux qui s’obstinent à prendre le film au premier degré. Ben non, mais justement c’est fait exprès, et ça n’empêche pas le film d’être intelligent. L’une des perles du cinéma français d’avant-guerre.

Une splendide comédie de Marcel Carné, avec un scenario et des dialogues signés Jacques Prévert, une œuvre remplie de poésie, d’humour et de charme. On retrouve avec grand plaisir l’exceptionnel Louis Jouvet, l’excellent Michel Simon et l’extraordinaire Jean-Louis Barrault, qui donnent vie à des personnages très amusants et très touchants… Un film brillant en tout points, les acteurs, le scénario, la mise en scène, tout dégage énormément de belles choses, c’est intensément agréable ! Tout ça avec une petite dose d’humour noir, c’est magique !

Le réalisateur : Marcel Carné (1906 – 1996)

Marcel Carné, né à Paris, est très vite attiré par le cinéma : il se rend chaque jeudi à une projection de film, puis de plus en plus souvent, trichant quelquefois pour ne pas avoir à payer le prix de sa place. Il suivra des cours de photographie à l’école des Arts et Métiers. La première rencontre décisive de sa carrière a lieu en 1928 : il rencontre Françoise Rosay, la femme de Jacques Feyder qui lui organise une rencontre avec Feyder. Carné est alors engagé comme assistant-réalisateur. Il dira de Feyder « Je dois à peu près tout à Feyder. Il m’a appris ce qu’est un film, depuis sa préparation jusqu’à la mise en scène proprement dite et aussi la direction des acteurs… La meilleure école de cinéma, c’est la pratique. »

Après son service militaire en Rhénanie, il revient en France, et en 1929, la revue Cinémagazine organise un concours de critique de films. Carné en soumet cinq et reçoit le premier prix. Il est engagé comme critique cinématographique. Il écrit aussi dans d’autres revues.

Il fait la connaissance de Jacques Prévert, le scénariste qui contribue à établir sa réputation. Le tandem Carné-Prévert montre lors de leur premier film, Drôle de drame, une entente remarquable qui ne cesse de se renforcer. Suivent ensuite Le Quai des brumes et Hôtel du Nord en 1938 et le remarquable Le jour se lève en 1939.

Lorsque Paris est libéré, Carné et Prévert présentent leur chef-d’œuvre, Les Enfants du paradis, situé dans le Paris du XIXe siècle.

Par la suite, Carné produit des œuvres moins importantes, mais de qualité, comme Thérèse Raquin (1953) et Les Tricheurs (1958). De 1929 à 1977, il aura réalisé 23 films.

Jacques Prévert : scénariste, dialoguiste et poète (1900 – 1977)

Jacques Prévert nait à Neuilly-sur-Seine, dans un milieu de petits bourgeois dévots, dont il ne cessera de moquer les obsessions et les convenances. À 15 ans, après son certificat d’études, il entreprend des petits boulots.

Jacques Prévert, qui a écrit le scénario et les dialogues du film (photo : Robert Doisneau, droits réservés)

Jacques Prévert, qui a écrit le scénario et les dialogues du film (photo : Robert Doisneau, droits réservés)

En 1922, à son retour du service militaire qui lui fit connaître Istanbul et l’écrivain Marcel Duhamel, il participe au mouvement surréaliste avec Desnos, Aragon, Artaud et bien sûr André Breton. Prévert finira par prendre position contre l’autoritarisme du « Maître ». Plus tard, il prendra ses distances avec le Parti communiste avec lequel il avait flirté sans jamais y adhérer.

En 1933, le groupe de théâtre Octobre, dont il fait partie, prend part à l’Olympiade du théâtre de Moscou, obtenant un premier prix qui ne sera jamais remis.

Prévert écrit, participant à des créations collectives, mais de plus en plus souvent, avec son frère Pierre, il produit des scénarios.

Il participera à quelques-uns des sommets poétiques du cinéma français, dont beaucoup avec Marcel Carné. Jacques Prévert écrit aussi de fabuleux poèmes en prose qu’il donne à son ami Kosma qui les met en musique pour Juliette Gréco, les Frères Jacques ou encore Yves Montand pour ne citer que les plus célèbres. Ces chansons, réunies pour la première fois en 1945, auront un énorme succès. Ses poèmes sont sur toutes les lèvres, avec un parfum de bonheur nostalgique et de liberté retrouvée.

Curieusement, c’est ce révolté qui avait en sainte horreur les institutions que la République des lettres allait couronner en baptisant de son nom quelques collèges et lycées et en le faisant entrer, à partir de 1992, dans l’illustre collection de la Pléiade — sur papier bible, s’il vous plait !

Ce qui a été écrit sur le film

Michel Simone et Jean-Louis Barrault (photo : image extraite du film)

Michel Simone et Jean-Louis Barrault (photo : image extraite du film)

Jean-Louis Barrault écrivait en 1974 : « Il me paraît, à trente-sept ans de distance, que l’originalité profonde de Drôle de drame a été caractérisée par une liberté totale d’expression et la synthèse de l’humour et de la poésie. Et c’est peut-être cela qui a surpris le public, mais c’est grâce à ce film que Prévert et Carné ont imposé au monde du cinéma la poésie burlesque, la qualité du verbe poétique, l’humour et la liberté totale dans les associations d’idées du montage. C’est ce qui me semble donner toute sa valeur moderne et future à Drôle de drame. »

Une distribution exceptionnelle

Une pléiade de « monstres sacrés » du cinéma français :

  • Françoise Rosay : Margaret Molyneux ;
  • Michel Simon : Irwin Molyneux, professeur de botanique, alias Félix Chapel, le romancier ;
  • Louis Jouvet : Monseigneur Archibald Soper, l’archevêque de Bedford, cousin de Irwin Molyneux ;
  • Jean-Pierre Aumont : Billy, le laitier amoureux d’Eva ;
  • Nadine Vogel : Eva, la secrétaire d’Irwin Molyneux ;
  • Pierre Alcover : l’inspecteur Bray de Scotland Yard ;
  • Jean-Louis Barrault : William Kramps, le tueur de bouchers, l’ennemi public n°1 du moment ;
  • Jean Marais : figurant – il a toujours démenti, mais tous les spécialistes le reconnaissent !

Bande-annonce

Visible ici :

L’accueil par les critiques et les spectateurs

À sa sortie en 1937, le film n’a pas été très bien accueilli par le public mais par la suite il est devenu un film culte pour toute une génération de cinéphiles, l’un des deux ou trois chefs-d’œuvre de Marcel Carné et surtout de Prévert, au scénario et aux dialogues. La scène entre Michel Simon en écrivain aux abois et Louis Jouvet, en évêque suspicieux, est dans toutes les mémoires et le «— Vous regardez votre couteau et vous dites « Bizarre, bizarre »… — Moi, j’ai dit « Bizarre, bizarre » ? Comme c’est étrange… Pourquoi aurais-je dit « Bizarre, bizarre » ? » sonne encore dans toutes les oreilles. Jean-Louis Barrault, tout jeune et quasi débutant, est inénarrable en tueur de bouchers qui prend des bains de minuit dans une mare aux canards. Un chef-d’œuvre d’humour que ce film inspiré par un roman anglais et transporté en France avec une audace incroyable.

 

Drôle de drame
Comédie (France), 1937
De Marcel Carné
Avec Françoise Rosay, Michel Simon, Louis Jouvet
105 min
Lundi 29 février à 20 heures, salle polyvalente des Baladins, 85 galerie des Baladins
Adultes : 3 € / soutien : 10 € / enfants et précaires : 1 €
Adhésion donnant droit à tous les films de la saison 2015-2016