Critique ciné : Les Jours heureux
Les Jours heureux, de Gilles Perret (affiche du film).

Ciné-Villeneuve, en partenariat avec le Musée de la Résistance et de la Déportation, propose en projection Les Jours heureux. Thèmes abordés, synopsis, avis, Ciné-Villeneuve vous raconte tout sur le film.

Le réalisateur

Gilles Perret est né en 1968 à Mieussy, un village de Haute-Savoie où il réside. Après des études d’ingénieur en électronique, il décide de s’orienter vers le cinéma. Depuis 1998, il réalise des documentaires, ancrés pour la plupart dans la réalité de ce pays qui est le sien, les Alpes, et diffusés par plusieurs chaînes de télévision : Arte, France 3, La Chaîne Parlementaire, la Télévision Suisse Romande… Il s’attarde chez ses voisins pour mieux aborder la réalité politique et économique du monde actuel.

Le film

L’histoire de la Résistance, surtout connue à travers ses faits d’armes, a fait l’objet de nombreux films romanesques dont certains ont connu de très grand succès comme La Bataille du rail et Paris brûle-t-il ? de René Clément ou Un condamné à mort s’est échappé de Robert Bresson ou encore Lucie Aubrac de Claude Berri, mais il a fallu attendre 2013 et le réalisateur Gilles Perret pour découvrir le documentaire Les jours heureux – Quand l’utopie des Résistants devint réalité. Pour Ciné-Villeneuve, en partenariat avec le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, le 70e anniversaire de la Libération est l’occasion de montrer ce film.

Stéphane Hessel sur le plateau des Glières, en 2009 (image extraite du film).

Stéphane Hessel sur le plateau des Glières, en 2009 (image extraite du film).

Grâce à de nombreux documents d’époque et aux témoignages précieux de dix anciens résistants, comme Stéphane Hessel, Raymond Aubrac, Léon Landini et Daniel Cordier, le spectateur se plonge dans l’histoire trouble de cette période, entre mai 1943 et mars 1944, sur le territoire français encore occupé. Seize hommes appartenant aux partis politiques refusant la collaboration (communistes, socialistes, radicaux, démocrates chrétiens et républicains), les syndicats CGT et CFTC et tous les mouvements de résistance vont changer durablement le visage de la France. Ils vont rédiger le programme du Conseil national de la Résistance (CNR) intitulé magnifiquement : « Les jours heureux ». Ce programme est encore au cœur du système social français puisqu’il a donné naissance à la sécurité sociale, aux retraites par répartition, aux comités d’entreprises, à EDF, etc.

Toutefois, le réalisateur ne se contente pas de faire revivre ce pan de notre histoire nationale. Il consacre la dernière demi-heure du documentaire à l’héritage actuel du CNR, avec les atteintes portées par les différents gouvernements successifs contre l’État-providence institué en 1945 en ne dissimulant pas son point de vue, marqué à gauche. On apprécie toutefois le fait d’avoir pris la peine d’interroger tous les acteurs de la vie politique actuelle (excepté l’extrême droite) sur ce qu’ils pensent de l’héritage du CNR. Gilles Perret parvient ainsi à traiter l’intégralité de son sujet avec un certain sens de la globalité en établissant un nécessaire pont entre passé, présent et avenir.

Ce film a été présenté en avant-première à Grenoble (une des cinq communes de France Compagnon de la Libération avec Nantes, Paris, Vassieux-en-Vercors et Île-de-Sein). Présentation avec l’auteur au Méliès le 27 mai 2013 pour le 70e anniversaire de la création du CNR.

La bande-annonce


BA « Les Jours Heureux » Gilles Perret par leimal74

Avant ou après avoir vu le film, visiter

Le musée de la Résistance et de la Déportation, à Grenoble (photo : Office du tourisme de Grenoble).

Le musée de la Résistance et de la Déportation, à Grenoble (photo : Office du tourisme de Grenoble).

Le musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, créé en 1996. Il se trouve au 14 rue Hébert, à Grenoble. Plus de renseignements sur www.resistance-en-isere.fr/.

Après la projection

Après le film, une discussion sera organisée avec l’historien Jérémie Libot, spécialiste de l’histoire des associations d’anciens résistants et d’anciens déportés.

Soutien

La Ligue de l’Enseignement soutient officiellement Les Jours heureux et un dossier pédagogique destiné aux enseignants et aux animateurs qui souhaitent conduire un travail approfondi sur ce film, sous l’angle du débat de société et sous celui de l’éducation à l’image, est disponible sur www.lesjoursheureux.net/dossier-pedagogique/

On trouvera aussi sur ce site un interview de 24 minutes du réalisateur Gilles Perret et quatre extraits du film (de 1 min 16 à 5 min 41) destinés à accompagner le dossier pédagogique. Quelques extraits d’un autre interview sont donnés ci-après.

Interview de Gilles Perret, réalisateur du film

Il doit être impressionnant d’être face à de tels hommes…

Gilles Perret : « Oui, j’ai eu beaucoup de chance de les rencontrer et surtout d’avoir une relation d’amitié avec eux. C’est formidable. Je n’aurais jamais pensé rencontrer de telles personnes. De savoir que Raymond Aubrac ou Robert Chambeiron ont travaillé avec Jean Moulin, c’est quand même quelque chose ! Rendons d’ailleurs hommage à Jean Moulin qui a été le penseur de cette histoire du CNR et rappelons que la sienne n’a elle aussi été racontée que très tardivement, éclipsée par celle du général de Gaulle. »

Ce sont eux qui vous ont mis sur la route de ce film ?

GP : « J’avais découvert l’existence des Jours Heureux lors d’un appel, en 2004, de grandes figures de la Résistance « à faire vivre les valeurs de ce programme, toujours actuelles ». Ça a été pour moi une révélation. Et, effectivement, mes rencontres successives avec ces résistants m’ont incité à aller plus loin dans la transmission de cette histoire. Par ailleurs, eux-mêmes tenaient à ce que ce film se fasse. Non pas pour la gloire mais bien pour que les principes édictés dans ce programme puissent éclairer le monde de demain. Ces gens n’ont pas pour habitude de regarder dans le rétroviseur, ils sont ou ont été de grands optimistes. »

Pourquoi avoir souhaité confronter les interviews des figures de la Résistance à celles d’hommes politiques aujourd’hui ou récemment aux affaires ?

GP : « Quasiment tous les candidats à la présidence de la République avaient mentionné le programme du CNR dans leurs discours, il m’a paru naturel d’aller leur demander en quoi ils estimaient légitime cette évocation, au regard des politiques qu’ils mènent ou qu’ils voudraient mener. Je n’ai pas été déçu par leurs réponses : une fois gratté le vernis, la plupart ont tendance à vite s’énerver sur les questions de politique fondamentale. Pour moi, l’histoire ne doit pas être mise au formol. Elle doit questionner le présent pour servir le futur. »

L’intégralité de l’interview est à retrouver dans la vidéo ci-dessous.

Les Jours Heureux – itw from OROLEIS on Vimeo.

En conclusion

Un film à ne pas rater pour le 70e anniversaire de la Libération, en cette période de crise économique où la solidarité disparaît au profit de toujours plus d’individualisme, bref tout le contraire de ce que nous a enseigné le Conseil national de la Résistance comme valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité et de solidarité !

Vous ressortirez de ce film avec un peu plus d’optimisme et de baume au cœur !

Les Jours heureux
Film documentaire (France), 2013
De Gilles Perret
Avec Raymond Aubrac, Robert Chambeiron, Stéphane Hessel
97 min
Vendredi 22 mai, à 20 heures, Espace 600, Le Patio, 97 galerie de l’Arlequin