À la MDH des Baladins, les habitants réclament plus de pouvoir de décision
La maison des habitants des Baladins, sur la place des Géants. (photo : BB)

Depuis juin, la maison des habitants des Baladins (MDH des Baladins, structure qui héberge plusieurs associations, dont Le Crieur de la Villeneuve) se retrouve sans directeur. Les élus sont venus à la rencontre des habitants pour faire le point sur la situation de ce centre social.  Une MDH un peu particulière par l’implication des habitants, qui demandent à assister aux entretiens d’embauche du nouveau directeur.

Vendredi 11 septembre, une douzaine d’habitants et d’acteurs associatifs écoutent Alain Denoyelle, élu à l’Action sociale et vice-président du Conseil communal d’actions sociales (CCAS) et Catherine Rakose, élue du secteur 6 (Villeneuve, Village-Olympique, Vigny-Musset), parler du directeur de la maison des habitants des Baladins. Car depuis le licenciement de l’ancien directeur, en juin, le poste est toujours vacant.

« Le calendrier du recrutement se télescope avec celui de la restructuration du CCAS », explique Alain Denoyelle. Jusqu’à présent, le personnel des centres sociaux (les MDH notamment) pouvait être salarié du CCAS ou de la ville de Grenoble directement. Au 1er novembre (1), tous les employés du CCAS deviendront salariés de la ville. Objectifs affichés : clarifier la situation des employés et leur permettre de changer de poste plus facilement. Ainsi, une « bourse à la mobilité » est ouverte au CCAS cet automne.

Le directeur du territoire, supérieur hiérarchique des directeurs de MDH du secteur, détaille le calendrier de recrutement, en trois étapes : « Il y a d’abord la bourse à la mobilité des directeurs de MDH et des directeurs de territoire, qui pourront se présenter pour le poste. La réponse doit être faite avant le 25 septembre ». À demi-mots, les élus confessent qu’il y a peu de chances que quelqu’un postule. « Puis, le poste sera ouvert aux ADL, jusqu’au 1er novembre ». S’il n’y a pas de recrutement en interne, le poste sera ouvert en dernier lieu aux candidatures externes. Dans ce cas, les délais de recrutement ne prévoient pas de nouveau directeur avant… janvier 2016.

Changement d’équipe

De quoi faire pousser des soupirs aux habitants. Une habitante dénonce un changement d’équipe complet, avec « le directeur licencié, le remplacement de l’agent d’accueil, celui de la référente famille… » Un habitant renchérit : « ils [les salariés de la MDH] ne peuvent pas construire quelque chose si l’équipe change tous les six mois ». Catherine Rakose tente de rassurer : « Le but est de pérenniser la MDH. »

En plus d’un lourd changement d’équipe, les effectifs de la MDH diminuent. Les postes de directeur et d’agent de développement local (ADL) seront fusionnés. Économies dans les quartiers populaires ? « C’est une simplification », explique le directeur du territoire, « les deux postes [de directeur et d’ADL] pouvaient empiéter l’un sur l’autre ». « Au niveau du personnel, la MDH des Baladins sera au même niveau que les autres MDH de la ville », se justifie Alain Denoyelle. « Sur le quartier des Géants [le secteur de la MDH des Baladins], c’est une MDH et un ADL pour 4 000 habitants. Sur le secteur 2, c’est une MDH et un ADL pour 30 000 habitants ! Et il y a le quartier Très-Cloîtres. »

Petit lexique de l’action sociale

centre communal d’action social (CCAS) : établissement public rattaché à une commune en charge de l’action sociale. Il gère les centres sociaux (maisons des habitants, MDH, à Grenoble). Le CCAS de Grenoble est le deuxième de France (après celui de Paris) en terme de salariés et de budget.

maison des habitants (MDH) : avant 2010, appelée centre social. Il y en a 11 dans la ville. Elles regroupent différents services d’aide, d’animation socio-culturelle, d’animation de la vie locale.

centre social : ancien nom des maisons des habitants.

agent de développement local (ADL) : employé des MDH en charge de l’animation.

Une MDH particulière

Sauf que la MDH des Baladins est un centre social particulier, comme ne manque pas de le rappeler Alain Denoyelle : « C’est le premier centre social de Grenoble à s’être appelé maison des habitants. Puis, par glissement, tous les centres sociaux sont devenus des MDH. » Particulière par son nom, la MDH l’est aussi par l’implication de ces principaux usagers, les habitants du quartier. « Ce n’est pas sûr qu’on puisse avoir ce type de réunion, à propos du recrutement d’un nouveau directeur, dans toutes les MDH », avance le vice-président du CCAS.

Un engagement fort des habitants en partie dû à l’histoire du centre social. Entre 2008 et 2012, la MDH des Baladins a été cogérée par le CCAS et une association du quartier, l’association Maison des habitants des Baladins, créée en 1986 et qui s’occupait alors du centre de loisirs. Cette cogestion, volonté de mutualiser les moyens et de donner plus de pouvoir de décision aux habitants, a mal tourné puisque l’association a déposé le bilan en 2012 (2), laissant le CCAS seul aux manettes.

La semaine dernière, j’ai compté 62 personnes au petit-déjeuner de la MDH.

Une habitante nuance : « Depuis que c’est exclusivement le CCAS qui dirige la MDH, chaque atelier ne marche que si les habitants y participent. Dans la pratique, c’est quasiment un fonctionnement associatif. » Les petits-déjeuners de la MDH, qui réunissent les habitants tous les mardis matins, sont aussi très fréquentés. « La semaine dernière, j’ai compté 62 personnes », s’enthousiasme un habitant.

Pouvoir de décision

« Les centres sociaux sont souvent associatifs », rappelle un habitant (3), « c’est une anomalie « historique » à Grenoble qu’ils soient communaux. Or, dans une association loi 1901, c’est le conseil d’administration qui dirige, les habitants ont leur mot à dire sur le choix du directeur. » Face à des habitants qui réclament plus de pouvoir de décision, les élus lâchent du lest et accordent que la fiche de poste – qui a déjà été envoyée pour le recrutement interne – puisse être relue par les habitants. Quant à la demande de ces derniers à participer aux entretiens d’embauche, comme cela se faisait à l’époque de la cogestion, la réponse se fait plus évasive : « À voir… », dit Alain Denoyelle.


(1) Lire le compte-rendu du conseil municipal du 22 juin 2015, délibération 53, page 24.
(2) Lire à ce sujet, en 2013, l’entretien accordé au Postillon par Guy Tuscher, à l’époque président de l’union locale des MJC de Grenoble, maintenant conseiller municipal à Grenoble.
(3) « Plus de 70 % des centres sociaux agréés sont actuellement en gestion associative », d’après la Fédération des centre sociaux et socio-culturels de France.